Audition de SUD éducation à la commission d’enquête sur la prévention des violences dans les établissements scolaires
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Suite au scandale de l’affaire Bétharram, l’Assemblée nationale a ouvert une commission d’enquête sur la prévention des violences dans les établissements scolaires. Les syndicats enseignants ont été auditionnés le jeudi 3 avril. SUD éducation y était pour réaffirmer son engagement dans la lutte contre les violences faites aux enfants dans la société et à l’école.
SUD éducation a été profondément indigné suite aux révélations sur les violences survenues à Bétharram. Il y a une particularité dans l’enseignement privé : certains établissements ont une approche de l’enseignement et de l’éducation réactionnaire et traditionaliste, qui constitue un terreau favorable à la diffusion d’une culture d’extrême droite, niant les droits des enfants et banalisant les violences qui leur sont faites. Mais ce n’est pas parce qu’il n’y a pas eu de scandale dans le public qu’il n’y a pas de violences, ni un système qui participe à les alimenter et à les invisibiliser. Cela signifie plutôt que ces événements sont considérés comme des faits divers et isolés par notre institutions. L’omerta sur les violences sexistes et sexuelles, de manière générale et particulièrement sur les enfants, est très forte, et l’école n’échappe pas à la culture du viol et de l’inceste qui traverse notre société.
SUD éducation reçoit tous les mois des remontées de violences sexuelles ou physiques commises par des personnels ou par des élèves sur d’autres élèves, qui ne sont pas prises en charge par l’administration. Si le ministère prend de plus en plus en considération les violences sexuelles subies par les enfants, il considère encore que ces violences ont lieu à l’extérieur des établissements scolaires. Les violences sexuelles commises au sein des établissements sont très largement invisibilisées et, quand elles ne le sont pas, elles sont souvent considérées comme étant uniquement le fait d’enfants.
Dans la plupart des dossiers que SUD éducation suit, l’administration et les personnels de direction et d’encadrement ne semblent pas connaître leurs obligations ni le cadre légal concernant les violences sexuelles. Lorsque la parole des élèves se libère, elle se heurte trop souvent au silence complice de l’administration, qui ne protège pas les victimes et refuse de sanctionner véritablement les agresseurs. Les signalements au procureur, les informations préoccupantes et les faits établissement ne sont pas toujours réalisés. Les auteurs présumés sont trop rarement suspendus. L’administration se cache derrière l’absence de plainte des victimes auprès des services de police ou répond qu’il n’y a pas lieu de prendre des mesures tant que l’enquête est en cours. La hiérarchie, qui manque de formation et de connaissance du cadre, participe également à désinformer les victimes sur les violences qu’elles ont subies et sur leurs droits. Les violences sont donc souvent mises sous le tapis.
Lorsque des faits sont dénoncés, l’administration se décharge également souvent sur la justice et attend des décisions pénales. Pourtant, les études montrent que plus de 80 % des plaintes pour violences sexuelles sont classées sans suite par la justice. Par conséquent, le ministère doit prendre en charge ces situations, réaliser des enquêtes administratives, suspendre les agresseurs présumés, accompagner les victimes. Lorsque la justice ne parvient à se positionner sur des faits de violences, le ministère ne peut en rester là. Un classement sans suite ne signifie pas que les mis en cause sont blanchis. Pour rappel, les fausses accusations en cas de violences sexuelles sont extrêmement rares, estimées entre 2 % et 8 % des accusations selon les études. Par conséquent, l’administration doit pouvoir mettre en sécurité les enfants sans partir du principe que les victimes de violences mentent, y compris lorsqu’elles sont des enfants.
SUD éducation revendique une véritable politique de lutte contre les violences au sein des établissements scolaires, avec :
- la nationalisation de l’enseignement privé, sans indemnité ni rachat ;
- le développement de la formation des personnels portant sur les violences, l’accueil de la parole des victimes et les protocoles à suivre en cas de violences sexuelles ;
- la création d’un métier d’éducateur·trice scolaire pour les AED qui ont un rôle important à jouer dans l’accueil de la parole ;
- le recrutement massif de personnels médico-sociaux capables de repérer et prendre en charge ces situations ;
- la mise en place de l’Evars dans l’ensemble des établissements scolaires, en prévoyant des heures dans les dotations afin qu’elles aient lieu ;
- la suspension immédiate à titre préventif de l’agresseur dès lors qu’un·e enfant témoigne de violences, et la mise en place d’enquêtes administratives et de sanction ;
- l’accompagnement et la protection des victimes et l’application des circulaires et lois qui assurent la protection des mineur·es victimes de violences sexuelles.
